Mélodie du Sud

Cinéma
Mélodie du Sud
Genre
Comédie
Musical
Drame
Fantastique
Technique
Hybride (mélange d'animation et de prises de vues réelles)
Animation 2D

Mélodie du Sud

Cinéma

Infos techniques

Titre original

Song of the South

Durée

94 minutes

Date de sortie en France

Pays d'origine

États-Unis : sortie le

Réalisation

Harve Foster
Wilfred Jackson

Société de production

Walt Disney Productions

Budget

$ 2, 200, 000

Distinction

Oscar de la meilleure chanson originale pour Zip-a-Dee-Doo-Dah (1948)
Oscar d'honneur à James Baskett (1948)

Synopsis

Dans le sud des États-Unis, peu après la Guerre de Sécession, un jeune garçon de sept ans prénommé Johnny s'enthousiasme d'aller avec ses parents dans ce qu'il croit être un lieu de vacances, la plantation de coton de sa grand-mère Georgia. À son arrivée, il apprend que ses parents se séparent et que son père doit retourner à Atlanta. Ce départ perturbe le jeune Johnny, qui décide de s'enfuir de la plantation, la nuit tombée, avec un simple baluchon. En chemin, il est attiré par la voix d'un vieil homme, l'Oncle Rémus, qui narre les histoires d'un personnage nommé Frère Lapin.

Critique

Honorable

Le film que Disney veut vous faire oublier

Impossible de rédiger une critique de ce film sans relayer la polémique, même si cela va à l'encontre des principes de la rédaction, c'est dire à quel point cette production pose un réelle cas de conscience. Adapté de l’œuvre de Joel Chandler Harris, Mélodie du Sud est une histoire dramatique se déroulant dans le vieux Sud américain dans une plantation de coton. Sortie en 1946, le film a fait l’objet d’une importante controverse autour des images et des propos raciaux qu’il véhicule, ce qui a poussé la firme Disney à désavouer l’œuvre en la privant de réédition et en la reléguant aux oubliettes, pour des raisons éthiques et morales.

Maladresse ou véritable manquement ? Nous ne tenterons pas de répondre à cette question, de toute manière l'époque a déjà condamné le film au silence, si bien qu'on a désormais le sentiment de ne plus avoir le droit de l'apprécier pour ce qu'il est véritablement, un objet de divertissement. Ce qui est certain, c'est qu'on ne peut que regretter d’emblée les mensonges pratiques qui nous sont présentés dans cette histoire et qui idéalisent de manière déplorable les rapports entre les blancs et les noirs américains durant l'époque de la ségrégation. On ne va pas se mentir, même si la production n’avait sans aucun doute aucune intention de véhiculer des idées racistes, le résultat reste le même, et le message est consternant de bêtise. Ce constat est d'autant plus vertigineux que le film se veut plein de bons sentiments.

Au-delà de la controverse, et sur un plan purement créatif et récréatif, Mélodie du sud se démarque grâce à ses qualités techniques et narratives incontestables.

 

Mélodie du Sud image 1

 

Les points forts


Après Saludos Amigos et Les Trois Caballeros, les artistes du studio Disney retentent l’expérience du mélange d’animation et de prise de vues réelles, pour un résultat techniquement et artistiquement abouti. Ici, l’animation est très soignée et bien intégrée aux véritables décors et aux côtés des acteurs en chair et en os, même si l’emploie de la technique n’égale pas encore le résultat atteint dans le futur Mary Poppins (qui fait clairement office de référence).

Tout cinéphile objectif saurait reconnaître et vanter les beautés esthétiques du film, d’autant plus qu’il a été produit à une époque où le secteur du cinéma était en difficulté en raison des conséquences économiques liées à la Seconde Guerre mondiale. L’histoire et les personnages débordent de bons sentiments, en dépit de l’effroyable maladresse des scénaristes. La bande-son est exceptionnelle. L’ambiance est poétique. Les dialogues, surtout ceux de l’Oncle Remus, sont savoureux et pleins de tendresses à l’égard des enfants, des personnages attachants qui profitent d’un merveilleux bonheur d’antan (et c'est la que le bât blesse).

 

Mélodie du Sud image 2

 

Les points faibles


Le film souffre d’une mauvaise réputation franchement compréhensible, car son histoire, qui se déroule après la guerre de Sécession, comporte des ajustements pratiques au sujet des conditions sociales des domestiques noirs (pour ne pas dire les esclaves). Ces interprétations candides nous font franchement grincer des dents, et peuvent être clairement considérer comme complètement racistes sur la forme, car elles donnent une image tronquée du contexte, en laissant croire au public (et notamment aux enfants) que les Afro-Américains réduis au rang de serviteurs par les blancs vivaient leurs conditions avec satisfaction, voir même avec un profond bonheur. Un aspect déplorable de la production qui se voulait au départ pleine de bons sentiments en nous présentant des personnages optimistes, mais qui se révèle une description d’un goût désastreux.

Les Afro-Américains, comme ils sont décrits dans cette œuvre, apparaissent certes affranchis de l’esclavagisme, mais ancrés dans les habitudes des blancs. Ainsi, ils sont toujours à leur service, dans une vision idéalisée de la cohabitation entre les blancs et les noirs, sur un fond de supériorité des uns sur les autres. L’impression est d’autant plus désagréable que le film ne se veut pas un témoignage ou une rédemption des événements passés, mais, au contraire, une déclaration d’amour pour une époque révolue. En arrondissant les angles pour ne pas aborder des sujets qui fâchent, le film donne fatalement l’impression de minimiser la souffrance d’un peuple tout entier, et d’une situation abjecte qui entache l’histoire de l’humanité tout entière.

Il aurait été sans aucun doute plus pertinent que les auteurs mettent en scène une famille d’Afro-Américain bien plus soucieuse de son sort, en abordant la problématique sans phare et en décrivant la situation avec davantage d'authenticité. D’un point de vue purement éthique, il aurait mieux valu que l’œuvre souffre de démagogie plutôt que de complaisance à l’égard d’un bon vieux temps que seuls les racistes sauraient regretter.

Le sujet délicat des domestiques de maison d’après la Sécession, comme il est traité dans ce film, éveille indéniablement chez les spectateurs des questionnements politiques et historiques qui gâchent complètement la dimension de divertissement, tel qu’elle a été pensée dans l’esprit des auteurs. Mais ne nous méprenons pas, il va de soi que le but premier des créateurs était de réaliser une œuvre familiale, et non pas un objet de controverse. On convient que c’est raté !

En marge de ce défaut navrant, qui a condamné l’œuvre au silence, le film souffre de petites maladresses techniques, notamment un manque de rythme et une description franchement stéréotypée des personnages.

 

Mélodie du Sud image 3

 

En conclusion


Si l'histoire avait été abordé d'une manière plus authentique, et qu'elle ne s’était pas aventuré vers des sujets hautement explosifs, Mélodie du Sud serait sans aucun doute devenue une œuvre très appréciée par le public, comme un trésor d’antan que l'on adorerait faire découvrir aux nouvelles générations. Mais aujourd’hui, l’œuvre est condamnée à une censure (qui ne dit pas son nom), victime d’un désaveu complet de la part de la firme ainsi que du public. Il semblerait donc qu’il n’y ait aucune chance de le voir édité en Blu-Ray ou en DVD. L'époque ne le permettrait pas. Peut-être que dans un futur apaisé, la société parviendra enfin à faire la part des choses entre une œuvre de divertissement et de la propagande réactionnaire, mais à l'heure actuelle, où chaque image doit être aseptisée afin de ne froisser aucune sensibilité, cela parait clairement impossible. Aussi, nous comprenons que la firme Disney ne veuille pas prendre le risque de voir une telle sortie mal interprétée (ce qui le serait inévitablement).

Pourtant, il ne faut pas oublier que Mélodie du sud a été produit dans le but de divertir, de développer un thème, l’enfance et le passage à l’âge adulte. La poésie, les séquences animées et les merveilleuses chansons nous rappellent que ce Classique rejeté est avant tout un chef d’œuvre d’inventivité, d’une tendresse rare, et d’une technicité franchement honorable. D’une certaine manière, il est désormais de bon ton de ne pas aimer ce film, comme si finalement l’époque obligeait le public de se dispenser de toute réflexion. On aimerait rappeler ici que les spectateurs ne sont pas des idiots, qu'ils sont capables d'apprécier les qualités inhérentes à la créativité et à la technicité de ce film, tout en conservant un regard critique sur les dérives du siècle passé. Aussi personne n'a à rougir d'apprécier ce film. Il n'est pas incompatible d'aimer Mélodie du Sud et de condamner dans un même temps le racisme, c'est d'ailleurs l'intention première de cette critique.

 

Mélodie du Sud image 4

 

Avis rédigé par Guillaume le d'après une version française

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