Film-documentaire animé
Film-documentaire animé
Le documentaire animé est une spécialité encore peu connue, qui émerge véritablement comme un genre nouveau avec la sortie du trés remarqué Valse avec Bachir, en 2008. Ce film n'est pourtant pas un cas isolé, comme on peut parfois l'entendre, et d'autres oeuvres, bien que moins connus, exploitent aussi les avantages de cette spécialité.
Les origines du documentaire animé
Le film documentaire est une œuvre qui se différencie de la fiction, par son caractère didactique, informatif, ou visant à restituer les apparences de la réalité. Ajoutez à cela une retranscription par l’animation, et vous obtenez le genre du documentaire animé, une spécialité qui peut avoir recours à des interviews, des commentaires scientifiques, des reproductions d’événements réels, ou l’illustration de souvenirs. Parfois, l’animation permet de pallier l’absence d’archives visuelles pour exprimer, prolonger, compléter, des faits connus, ou pour nuancer leurs brutalités.
Le Naufrage du Lusitania de Winsor McCay amorce en 1918 le mariage de l’animation au genre du film documentaire. L’œuvre est une reconstitution du naufrage du bateau britannique, le 7 mai 1915, torpillé par les forces allemandes. On peut clairement établir qu’il s’agit du premier film documentaire animé de l’histoire du cinéma. Ici l'animation permet de mettre en image l’histoire invisible.
Documentaires animés notables
En 1941, Le Dragon récalcitrant de Hamilton Luske et Alfred L. Werker présente l’envers du décor du Studio Disney de Burbank, à la manière d’un documentaire ponctué de cartoons.
René Laloux réalise le court métrage Les Temps morts en 1964. L’œuvre mêle les prises de vue réelles à l’animation, le tout en noir et blanc, dans un pamphlet politique dont le but est de dénoncer le cercle vicieux de la violence de l’humanité.
Pica-don, un court métrage japonais de Renzo Kinoshita raconte la tragédie d’Hiroshima en s’inspirant des témoignages des survivants.
Le cinéaste Rachid Bouchareb fait appel à l’animation pour documenter des faits réels sans images directes : la tragédie de Thiaroye en 1944, dans son court métrage L’Ami y a bon. Le film retrace le destin funeste de tirailleurs sénégalais massacré par les autorités françaises après la Seconde Guerre mondiale.
Le court métrage Silence de Orly Yadin et Sylvie Bringas entremêle des images d’archives à des séquences animées afin de donner la parole à une rescapée des camps de concentration de Terezin.
En 2008, le film Valse avec Bachir d'Ari Folman, est une véritable caisse de résonance pour le genre du documentaire animé. La coproduction israélo-franco-allemande est d’ailleurs considérée comme le premier long métrage documentaire d’animation de l'histoire du cinéma (à tort, comme le montre les exemples cités plus haut). Le film, plusieurs fois primé, raconte l’histoire d’un ancien soldat israélien qui fut engagé pendant les événements de la guerre du Liban au cours de laquelle eurent lieu les massacres des camps palestiniens de Sabra et Chatila, et qui depuis lutte contre l’oubli dû à des symptômes de stress post-traumatiques.
Après avoir raconté son histoire dans la bande dessinée Couleur de peau : miel, le dessinateur Jung Sik-Jun choisi ce genre pour l’adaptation cinématographique éponyme. Le long métrage raconte sa quête d’identité dans son pays d’origine, ponctué de souvenirs d’enfance dans sa famille d’adoption.
Le film Camp 14 : Total Control Zone de Marc Wiese complémente le témoignage de Shin Dong-Huyk, né dans un camp de prisonniers politiques en Corée du Nord, par des séquences animées.
Le film expérimental Conversation animée avec Noam Chomsky, réalisée par Michel Gondry est, comme son titre l'indique, une mise en image d’un entretien que le réalisateur a eu avec le philosophe Noam Chomsky.
Dans Jasmine (2013), Alain Ughetto revit sa liaison amoureuse avec une étudiante iranienne en pleine révolution khomeyniste. Le film d’animation en pâte à modeler utilise également des images d’archives de l’INA.
Impact du genre documentaire animé
Comme on peut l'observer, le genre permet d'aborder des sujets difficiles, plus accessibles (et supportable) par le biais de l'animation que par des images brutes. Si l'on considère souvent que le genre en est à ses balbutiements, lorsqu'on s’y intéresse de plus près, il nous faut reconnaitre que ce n’est pas tout a fait exact. Valse avec Bachir est loin d’être précurseur dans le domaine, mais son impact a permis de mettre en lumière cette spécialité incroyablement instructive qui, jusqu’à lors, n’intéressaient qu’un public très restreint. Nul doute que le film documentaire animé a de beaux jours devant lui, comme en témoigne le nouvel intérêt des productions pour le genre.
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